Interview / Judith Spinoza
Elles ont du goût (tout court) et aussi celui de lancer une marque 100% Argentine. Avec ÀCheval Pampa, Sofia Achaval de Montaigu et Lucila Sperber, réveillent la cowgirl qui est en vous. Pantalon, chapeau, sacs, ceinture, c’est le vestiaire du gaucho réinventé, réinterprété selon les codes du luxe. Sauvagement chic !
La première, très blonde, adore la Jerry Hall des années soixante. La seconde, très brune, dispose d’une collection impressionnante de pièces vintage Gucci et Prada. L’une et l’autre ont du chien. L’une comme l’autre sont totalement et absolument pas argentines, en cela qu’elles disposent par essence d’un style et d’un caractère qui oscille entre leur terre natale et une finesse européenne. Ensemble, elles incarnent et dirigent la tête bicéphale de leur jeune label, né en 2018, soutenu immédiatement par des investisseurs argentins. Après une superbe première collection gauchos, présentée au Ritz durant la fashion week parisienne en mars, c’est l’été, en hommage à la femme de gauchos, pointera bientôt son nez. Plus femme, plus chic, plus belle, cette fille des grands espaces et des échappées animales rompt avec le cliché de la cowgirl américaine très à la mode cette saison. La fille ÀCheval Pampa est une walkyrie sud américaine, bénie par le soleil, symbole de la marque. Pas poseuse, elle revendique simplement l’authenticité de son territoire : la pampa, coincée entre l’Argentine, l’Uruguay et le Brésil. Rencontre !
1nstant : Vous n’êtes ni l’une ni l’autre étrangères à l’univers de la mode. Lucila est brand manager chez Rochas, et vous, Sofia, êtes styliste. Qu’est ce qui vous a poussé à créer votre marque ?
Sofia Achaval : En effet. Par le passé j’ai travaillé comme mannequin pendant mes études au studio Berçot début 2000 (Chloé parfum, défilé Marc Jacob pour Vuitton, Mario Testino) puis aux côtés de Vanessa Seward chez Azzaro et aussi comme styliste pour V magazine. C’est là que j’ai appris les bases du métier. L’envie m’est venue du fait que les gens m’arrêtaient souvent dans la rue pour me demander où j’avais trouvé mes vêtements. Je portais des vêtements ou des accessoires argentins. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à creuser.
Lucila Sperber : Travaillant entre Paris et Buenos Aires pour Rochas Menswear, je suis très concernée par l’aspect business, aussi bien au niveau créatif que par la mise en place d’outils marketings.
ÀCheval c’est quoi, un mélange de raffinement et d’esprit brut ?
S.A. : Un mélange de finesse et de simplicité. Nous ne sommes pas une marque tendance mais intemporelle, avec un esprit argentin. ÀCheval est un classique à venir ! Nos mots d’ordre sont le chic et la qualité des matières.
L.S. : Lorsque nous avons commencé à travailler le concept de la marque avec Sofia il était important pour nous de rester fidèle à l’esprit original du pantalon « bombacha de Gaucho » tout en le retravaillant et lui apportant une touche moderne et luxueuse.
Le « gaucho » est le fil rouge de votre première collection et de vos inspirations…
J’ai vécu en Argentine jusqu’à mes 20 ans. J’y ai grandi avec les chevaux et j’ai toujours côtoyé les gauchos. Ils ont une allure incroyable que la marque revisite.
Justement, le pantalon de gauchos est l’élément clef. Qu’avez vous twisté ?
Nous avons imaginé trois modèles autour du pantalon traditionnel très bouffant, le Al Boleo. Le premier modèle directement issu du Al Boleo est affiné, adapté au corps féminin et plus chic. Le second, Al Viento, est plus court, plus large et plus droit. Enfin, le Gauchita est une sorte de jodhpur, plus large aux cuisses, disposant d’un revers à la taille, enserré par une ceinture. Ces modèles existent en différentes matières et couleurs : velours, paillettes…
Quelles sont les autres pièces phares de votre collection AH ?
Les sacs avec leur jolie boucle en fer à cheval, par lesquels nous avons d’ailleurs commencé. Les ceintures dotées d’une boucle en bronze réalisée par l’artiste argentine Luna Pavai qui a également dessiné la ligne de bijou en argent plaqué or ÀCheval Pampa.
Le vestiaire s’agrandi. Que préparez vous pour la collection P/E ?
L’été 2019 est placé sous le signe de la femme gaucho. De larges jupes à volant, des robes amples, des combinaisons déclinées en satin, en coton, portées avec des espadrilles. Nous avons aussi imaginé une cape. Evidemment, les pantalons seront présentés dans leur version estivale, en soie ou en coton.
Où fabriquez-vous ?
Nous sommes « made in the pampa », là où les gauchos travaillent. Un milieu naturel et une zone géographique qui englobe l’Argentine -où des selliers fabriquent toutes nos pièces de cuir (ceintures et sacs)-, l’Uruguay –où nous fabriquons nos vêtements-, et le sud du Brésil.
Quelle est la petite influence française de vos collections ?
S.A. : Yves Saint Laurent des années soixante dix ! Lui même, à l’époque, s’était inspiré des gauchos en imaginant des looks avec chapeau, cape et pantalons bouffants !
L.S. : Je pense qu’elle est reflétée dans l’esprit nonchalant de la marque, chic et facile à porter.
Vous disposez de quelques points de vente multimarque à travers le monde. Quels sont vos projets de développement ?
Nous allons développer l’e-commerce, et pensons, pourquoi pas à un pop up store. Mais pour l’heure, nous souhaitons asseoir la marque auprès nos acheteurs, notamment lors de la prochaine fashion week en juin à Paris.
3 pièces phares de votre vestiaire ?
S.A. : Une robe violette et fuchsia YSL des 70’s ; une veste et un jean large Chanel : un col roulé.
L.S. : Un blazer Saint Laurent vintage en laine verte, une paire d’espadrilles noires, une blouse blanche Balenciaga par Nicolas Ghesquière.
Qui aimeriez-vous habiller ?
Des filles comme Margherita Missoni, une amie, qui porte à merveille nos pièces. Il y aurait aussi Bérenice Bejo, Bella Hadid. Et toutes les autres femmes. Chacune d’entre elles peut porter nos tenues.
La tenue idéale ÀCheval ?
S.A. : Pour le jour, un total look blanc, chemise et pantalon, flanqué d’un chapeau noir. Pour le soir, un pantalon à paillette combiné au col roulé noir en coton.
L.S. : J’adore le pantalon Al Boleo en coton noir, la ceinture en cuir noir à boucle Sun en bronze, associés à la chemise blanche Gloria. Pour le soir, un total look argent, chemise et pantalon en satin Al Viento.
- Interview / Judith Spinoza
- Produced / 1nstant.fr