Les anecdotes, lorsqu’on évoque l’Hôtel Barriere Le Majestic de Cannes, flirtent avec les étoiles et s’envolent au-dessus des eaux bleues de la Méditerranée. Ce palais art déco, qui se détache avec élégance sur la Croisette, et le public raffiné et cosmopolite qui le fréquente attirent les regards et suscitent l’admiration. À quelques pas, le Palais des Festivals, qui depuis 1946 accueille le plus célèbre événement de cinéma au monde. Et dont Le Majestic semble prolonger le tapis rouge… BY SILVIA MANZONI.

Le palace cannois, en raison de son emplacement privilégié, a associé son nom à de grandes personnalités internationales qui y ont séjourné ou vécu des moments exceptionnels. Voici Paul Newman, en 1983, se présentant à la réception, inattendu, avec sa valise à la main. L’hôtel est complet, mais comment refuser une chambre à cette icône du Septième Art ? Le propriétaire Lucien Barrière ne réfléchit pas longtemps : il lui cède sa suite personnelle. Ou encore Brigitte Bardot, poursuivie par les paparazzis, courant sur la plage du palace, puis, ayant emprunté le ponton blanc de 60 mètres de long qui s’élance sur la mer, s’échappant à bord d’un bateau à moteur au large… Certains se souviennent d’une fête qui dura toute la nuit (jusqu’à 8 heures du matin suivant) dans la suite Penthouse, de 650 mètres carrés, qui devint en 2011 le théâtre de la joie débridée de l’équipe de « The Artist », dont le protagoniste Jean Dujardin venait de décrocher la Palme d’or. Tout ici, au Majestic, est légende : un tissu de grandes et petites histoires racontant l’épopée du cinéma moderne à travers ses icônes, composant un livre d’or bordé de glamour et de beauté. Le personnel de l’hôtel parle avec discrétion de ses beautiful guests, mais les vérités filtrent, distillées comme des gossip captivants : Pedro Almodóvar demandant une montagne de coussins en plumes, la Bible toujours présente sur la table de nuit de Charlton Heston, les plantes vertes requises par Holly Hunter, les bonbons dont Wim Wenders est friand… Les silhouettes de Jean Gabin et Alain Delon, qui séjournèrent ici dans les années 1960 pour tourner quelques scènes de « Mélodie en sous- sol » de Henri Verneuil, planent encore dans l’air, telles des empreintes qui scellent le lien entre l’hôtel et le cinéma. Et encore la gentillesse de Jean Rochefort, de Jeff Goldblum ou de Morgan Freeman en passant par les rayonnantes Gong Li et Sharon Stone.

Une histoire (presque) centenaire
Entre Le Majestic et la ville de Cannes l’histoire d’amour commence dès l’inauguration, en 1926. En 1920, l’entrepreneur anglais Henri Ruhl achète l’Hôtel Beau Rivage et une propriété attenante, la Villa des Enfants. En 1924, il les fait raser pour ériger un nouvel édifice en style Art déco, dont les plans sont confiés à l’architecte parisien Théo Petit. Ruhl s’était déjà distingué dans la région en construisant certains des plus beaux palaces de la Côte d’Azur, dont il était tombé amoureux, comme le Carlton à Cannes ou le Ruhl à Nice. En 1926 l’inauguration du Majestic marque les esprits. En 1953, à la mort de Ruhl, l’homme d’affaires français François André reprend l’hôtel et désigne son neveu Lucien Barrière comme son successeur et héritier universel. Ce sera lui qui accompagnera l’évolution du Majestic. En 1965, les combles sont réaménagés pour créer deux nouveaux étages. À la fin des années 1990, Marta Barrière, épouse de Lucien, s’inspire de l’Égypte antique pour créer le nouveau bar. En 2008, le hall de l’hôtel s’offre un relooking : des tonalités claires et enveloppantes, comme le blanc crème, l’ivoire et le beige, illuminées par des décorations en feuilles d’or, confèrent à l’atmosphère une élégance luxueuse et apaisante. En 2010, une seconde aile voit le jour, après quatre années de travaux. Le décorateur Jacques Garcia signe de nouveaux aménagements pour rendre ce palace encore plus accueillant, à la hauteur de la réputation qui l’a propulsé dans la légende. La beauté ne saurait exister sans une âme généreuse : Le Majestic adopte les bonnes pratiques pour lutter contre le gaspillage, en assurant la maintenance informatique des systèmes de chauffage et de climatisation, en améliorant l’isolation thermique, en adoptant un éclairage basse consommation et en optimisant ses commandes. Il participe également à la préservation de la biodiversité en entretenant des ruches sur ses toits.

Les « bijoux » du Majestic
Ce sont ses mythiques suites qui ont accueilli, au fil des années, les plus grandes stars lors des festivals, auxquelles certaines sont dédiées. La suite Michèle Morgan porte le nom de l’actrice française aux célèbres yeux bleus. «J’ai créé une suite à l’image de cette immense artiste qui l’a inspirée: lumineuse, d’un chic intemporel», explique la décoratrice Chantal Peyrat, qui en signe les décors. Les palmes d’or ornant les murs et le linge rappellent que cette actrice fait partie intégrante de l’histoire de Cannes et de son festival, depuis qu’elle remporta le prix d’interprétation féminine lors de la toute première édition, en 1946, pour son rôle de la jeune aveugle Gertrude dans « La Symphonie Pastorale » de Jean Delannoy. Il y a aussi celle dédiée à Christian Dior, où l’on peut admirer une réplique du bureau du grand couturier. C’est ici, dans ce décor raffiné évoquant celui de la maison de l’avenue Montaigne, que les stars viennent choisir leur tenue de soirée avant de monter les marches. Les portraits de deux légendes du cinéma, Jean Gabin et Alain Delon, ornent les murs de la suite Mélodie, nommée d’après le film «Mélodie en sous-sol» d’Henri Verneuil, dont certaines scènes ont été tournées en ces lieux. Enfin, on atteint le Penthouse Majestic, un appartement de 450 m2 avec une terrasse de 150 m2 surplombant la baie de Cannes, doté d’une piscine de 11 mètres de long. Un rêve réservé aux plus grandes stars. Les hôtes de ces suites — ainsi que ceux de la Riviera Horizon, la Blancine et l’Escale — sont choyés par un majordome personnel, dont la capacité à exaucer leurs désirs est le gage d’un séjour inoubliable.
Un palmarès qui rime avec qualité et savoir-faire
Pendant le Festival, l’effectif du Majestic passe de 350 à 700 personnes. Une miseà niveau nécessaire pour accueillir les 8 000 festivaliers et plus de 300 émissions (TV et radio) enregistrées dans l’établissement. Curieux de connaître quelques détails de la vie du palace durant ces douze jours ? Le clients consomment 14 000 serviettes de bain, 15 000 draps, 8000 peignoirs, 16 000 savonnettes, 1 000 litres de bain moussant. 8 000 roses sont déposées dans les chambres, 500 pantalons et chemises sont nettoyés et repassées. Côté cuisine, on n’est pas en reste: pas moins de 25 000 repas sont servis, que ce soit au restaurant ou lors des réceptions privées. On voit défiler 2 tonnes de homard, 3 tonnes de poisson, 40 tonnes de fruits et légumes, 160 000 œufs, 50 kilos de caviar, 350 kilos de foie gras et 800 kilos de langoustes. Sans oublier 18500 bouteilles de vin, dont plus de la moitié, comme il se doit lors de cet événement, de champagne.

Relax, gourmandise et farniente
Le spa et la plage, s’étendant sur 2 600 m2, offrent un véritable havre de paix où l’on peut se mettre dans la peau d’une star. Et dans ces espaces, les célébrités ne se comptent pas seulement sous les parasols. Le menu du restaurant BFire de La Plage est signé par le chef Mauro Colagreco, triplement étoilé Michelin, considéré comme l’un des plus grands chefs au monde. À l’intérieur du Majestic, le style raffiné et intemporel du restaurant Fouquet’s, digne héritier de son « grand frère »parisien, une institution fondée en 1899, confère à l’ensemble une élégance inégalée. Au bar, les cocktails d’Emanuele Balestra mettent en scène des herbes, fruits et fleurs locales, ainsi que d’autres ingrédients faits maison. Que diriez-vous d’un Margarita à la sauge ou d’un Gin Fizz à la Betterave ?

Quelles sont vos envies pour terminer la soirée?
Paillettes et bonne musique au Bisous Bisous, le club du Majestic où aller danser et écouter des playlists orchestrées par les meilleurs DJ du monde. Ou, pour les cinéphiles, une projection privée au cinéma Diane, également équipé de la technologie 3D. Au sol de cette salle très cosy une moquette déroule les titres des films et les noms des stars qui ont fait la légende du Festival de Cannes. « Si le cinéma est l’évasion, la Cinémathèque Diane est la voie royale qui y conduit », rappelle t-on ici. On vous l’avait dit : ici au Majestic les stars n’occupent pas uniquement les suites. Elles font partie intégrante de la vie de ce palace, telles des muses protectrices.
